Trois européens au Népal, printemps 96

12/04/96 Départ de Toulouse-Blagnac à 17h. Comme d'habitude, nous sommes en avance. On en profite pour faire quelques photos d'identité: on ne sait jamais, on reviendra peut-être défigurés! Air Liberté nous transporte dans un A310 (peu après le départ de Toulouse, je repère la piste privée de Bouloc: il fait beau). Malgré le temps de vol relativement court, on nous sert une collation et même du champagne. Nuit à Paris.

13/04/96 Le vol n'est qu'à 19h30. Journée de repos donc. Je relis Tintin au Tibet: ça ne s'avérera pas inutile pour contourner les Stupas du bon coté! On rate le RER prévu mais comme on a une avance suffisante, on attendra encore à l'aéroport. Il fait gris et on est heureux de quitter cette banlieue triste. À l'enregistrement, on trouve des groupes (Terre d'aventure, CAF). Nombreux sont ceux qui ont la tenue de trekking. Le DC10 de la compagnie Biman Bengladesh Airlines décolle à 19h35. Ça commence étonnamment bien. On nous sert rapidement un curry tout à fait mangeable.

14/04/96 Arrivée à Dacca, Bengladesh, à 10h heure locale (-4h par rapport à Paris). Du hublot, on voit beaucoup d'eau... Il fait beau. Au guichet d'enregistrement pour le vol jusqu'à Kathmandou, on nous garde notre passeport et notre billet. Bizarre. Avant de nous les rendre avec une carte d'embarquement, on nous offre un sandwich et un Coca. Apparemment, un vol de pèlerinage est prévu sous peu: l'aéroport est remplis de musulmans habillés (hum, entortillés d'un drap) de blanc. Ces derniers font leur prière tour à tour, par paquets d'une cinquantaine, agenouillés sur le sol de la salle d'embarquement. Un 747 doit les emmener à Djeddah. On nous emmène en bus jusqu'à l'appareil: il fait extrêmement chaud (35C) et on est pressé d'embarquer. Le Fokker 28 est vraiment bourré et la rumeur court que tous les bagages n'ont pas pu être embarqués... On décolle à 13h45 et on nous sert (encore) à manger. Le ciel est nuageux: pas d'espoir de voir une montagne dépasser. 15h à Kathmandou (-3h45/Paris). 26C. Andras, le hongrois de l'équipe, nous attend. On choisit de prendre le taxi pour rejoindre l'hôtel (200Rs) pour traverser la ville. Sorti de l'environnement de l'aéroport bien propre (bitume, arbres, golf...), on plonge: poussière, bruit (klaxon), circulation démente. Cette circulation comprend essentiellement des piétons, des vélos, des tricycles (taxi), des mobylettes (Honda RX100 pour la plupart) des rickshaws (espèce de triporteur pétaradant servant de taxi), des triporteurs de transport (8 personnes au moins!), des voitures (petites et moyennes, toutes japonaises), quelques 4x4 et des bus ... sans oublier les vaches qu'il ne faut pas déranger et quelques chiens plus morts que vifs. Tout ça constitue un flot continu dans chaque sens (à gauche). Aux carrefours, la signalisation est absente et, grâce à une vitesse modérée, ça ne se passe pas trop mal. L'hôtel Ambassador est situé au nord-ouest de la ville dans le quartier de Lazimpat, à côté de l'ambassade de France. Le portier nous arrache presque nos bagages et on rejoint nos chambres. On ressort pour aller marcher dans la ville. On part au hasard. les rues sont bordées par une multitude de boutiques minuscules. Tout y est relativement poussiéreux. Tout ça est aussi relativement odorant. Des ordures ça et la. On traverse quelques jardins et on monte jusqu'à un temple désert. Vue sur la ville. On rentre en passant par Thamel, quartier nettement plus moderne avec beaucoup de magasins de matériel de montagne et des boutiques de communication (téléphone, fax, courrier électronique). On va dîner à coté de l'hôtel au Him Thaï (moyen, 670Rs pour 3). Pas de problèmes pour s'endormir...

15/04/96 22C dans la chambre, beau temps. Déjeuner à l'hôtel avec la spécialité népalaise: 2 chappatis avec un petit curry de légumes accompagné de "black tea" (300Rs pour 3). L'agence Lama Excursions contactée par fax depuis la France nous appelle pour confirmer un rendez-vous à 10h à l'hôtel pour arranger les permis de trekking et les vols sur Lukla. On leur laisse alors (en hésitant un peu...) nos passeports et les dollars: 180$ pour le vol Kathamdou-Lukla, 21$ pour le permis de trekking pour 3 semaines, 20$ pour l'entrée du parc. On part à pieds pour la Boudhastupa située au nord-ouest de la ville. C'est assez fatigant dans cet environnement peu propice à la ballade. La place, interdite aux véhicules, autour de la stupa est nettement plus calme et plus agréable. Derrière la place, le monastère est facilement reconnaissables aux tenues jaunes et rouges qui sèchent sur les balcons. On mange (des momos) en terrasse au Stupa View. Agréable. Direction la poste. Au moment de négocier le taxi, Sylvie fait une grossière erreur et on paye une petite fortune: 200Rs! La poste vaut le détour: sombre, poussiéreuse, bondée (mais il y des queues spéciales "foreigners") ... mais on y vend des timbres. On revient vers l'hôtel en commençant par traverser Durbar Square. On s'aperçoit que la réserve de pellicules risque de s'épuiser rapidement. Mais c'est moins cher ici qu'en France (150 Rs pour une pellicule photos, 36 pauses, 100asa). À l'hôtel, les types de l'agence sont au rendez-vous avec nos passeports, nos billets et nos permis de trekking. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. On repart, en rickshaw cette fois ci (négocié habilement par Andras) vers Swayanbhunath stupa (70 Rs) à l'ouest de la ville. Celle-ci se trouve en haut d'une petite colline qui domine Kathmandou. Quelques marches et quelques singes et on est en haut. Belle vue sur la ville. On s'attarde un peu sur un spectacle improvisé de singes. De l'autre côté, il y a le monastère, lieu nettement plus calme étonnamment entouré d'ordures. On rentre à pied et on s'arrête pour dîner dans la très recommandable Tibet's kitchen à Thamel où on savoure des pizzas. On fuit alors que le groupe français de Terres d'av' doit arriver. 20h30 à l'hôtel.

16/04/96 Lever matinal et rendez-vous avec le taxi (affrété par l'hôtel) à 5h30. Les rues sont relativement calmes à cette heure là. À l'aéroport, le chauffeur ne peut pas ouvrir le coffre; tout le monde essaye la clé mais sans succès, ce n'est pas la bonne. Le chauffeur demande alors à un autre taxi (du même type) sa clé de coffre, et oh miracle, ça s'ouvre. On demande un thé pour patienter à l'enregistrement. On attend. Au bout d'une demi-heure, on finit par nous dire qu'il n'y a que du café! La salle d'embarquement est nettement plus confortable et on se dirige enfin vers l'engin: un hélicoptère d'Asian Airlines énorme; une vingtaine de passagers et du fret. Le servie à bord consiste en un bonbon et du coton ... à se mettre dans les oreilles. On décolle à 7h15 (prévu à 7h). On monte jusqu'à 3450m (Avocet en poche) et en une quarantaine de minutes, nous sommes à Lukla. Une fois le rotor arrêté, on est presque surpris par le calme. C'est l'heure d'ajouter les poches (amovibles) au sac et de chausser. On démarre lentement, en savourant le calme vers 8h45. Le chemin commence par descendre doucement pour rejoindre le sentier en provenance de Jiri. Vers 10h on s'arrête pour prendre un thé (7Rs), avec une vue sur notre première grand sommet: le Khumsum Kangru, 6367m. C'est haut. C'est lors de cette première pause qu'on rencontre pour la première fois les "anglais" (la femme en jupe est remarquée sinon remarquable) accompagnés par un sherpa. Vers 11h40, nous sommes à Phakding (2652m). On choisit le Namaste lodge pour manger un Dal Bhat (du riz, des légumes et une espèce de soupe de lentilles, 60Rs) pour les uns, des momos (espèce de raviolis géant, 50Rs) pour les autres. On repart vers 12h40 pour continuer jusqu'à Jorsale à l'entrée du parc (contrôle du permis de trekking). Alors que la pluie commence à tomber (15h15), on s'arrête à l'Everest guest house (2774m). On est bientôt rejoint par les anglais que la suisse (qui se révélera être allemande mais sera dorénavant appelée "la suisse") et Bibi sherpa. Petit orage (9C dehors, 18C dedans). On choisit le "dormitory" (20Rs/p). On s'endort sans problème après le dîner (soupe de tomate, 30Rs, riz et légumes 50Rs, thé 5Rs).

17/04/96 Lever 6h30. 12C dans le dortoir. Chapatti (15Rs) et omelette (20Rs) finissent de nous réveiller. Le ciel est couvert quand on part (8h) en direction de Namche Bazar. La montée après le pont (la carte est fausse: le pont est sur le torrent en provenance de l'est) est raide et nous amène rapidement au village à 3440m (10h15). D'autant plus que l'altimètre est vraiment pessimiste, pratiquement 100m trop bas (le calage au pont devait être faux). Namche est un gros village, orienté au sud, formant une espèce d'immense hémicycle dont le bas est occupé par la Stupa. Un torrent, couvert dans la partie haute, le traverse et alimente une série (4) de moulins à prières et parait t-il la centrale électrique. On y trouve des dizaines de lodges, des boutiques de babioles, une "banque", un poste de police, un cabinet dentaire, une poste... La village est encore en construction: au moins trois chantiers (dont on constatera l'évolution rapide entre nos deux passages à deux semaines d'intervalle). Après une rapide exploration, on s'installe au Thamserku view lodge, un choix que se révélera excellent (les anglais feront le même). On a le temps d'aller montrer nos permis de trekking au poste de police et d'écrire quelques cartes postales avant de goûter à la bonne cuisine du Thamserku. Après renseignements, on dégote la "poste" pas vraiment reconnaissable. M'enfin, ça vend des timbres (15Rs pour une carte postale pour l'Europe). On monte sous la pluie a Syamboche, l'aérodrome qui domine Namche, 300m plus haut. On continue sur Khumjung sous la tempête de neige.

Le village est plutôt désert et on ne trouve même pas de quoi boire un thé. On choisit de revenir via l'Everest view hôtel perché à 3880m. Mais étant donné que la visie est d'environ 50m, le toit du monde nous attendra encore un peu. L'hôtel offre un thé plutôt cher (100Rs) et un téléphone international que Sylvie s'empresse d'essayer (12$ pour 3mn minimum). Il neige toujours alors qu'on redescend rapidement sur Namche. Ça se calme alors qu'on arrive à la maison du parc de Sagarmanta qui est déjà fermée (8h-16h). On mange d'excellentes galettes de pomme de terre (potato hashbrown) en discutant avec l'hôtelière qui parle même un peu français. Elle nous apprend qu'elle est allée à l'école à Khumjung: 45 mn de marche (nous avons mis plus d'une heure) matin et soir. Des allemands qui redescendent nous apprennent que le Cho La (col que l'on prévoit de traverser) est fermé ou plus exactement n'a pas encore été passé cette année à cause d'une importante couche de neige. La légende (une rumeur se transforme vite en légende) veut que ce soir là, les anglais et la suisse ont échangé leur guides, autrement dit Bibi, apparemment trop "ami" avec la suisse, est devenu le sherpa des anglais. On se couche tard; 21h!

18/04/96 6h30. 10C à l'intérieur, gel à l'extérieur. Beau temps. Nous sommes réveillés par une cérémonie "sonore" à l'occasion de la mise en place d'un mat supportant des drapeaux à prières devant la maison. C'est un jour d'acclimatation et on part donc avec un sac léger en direction de Thame (8h). Encore une fois la carte est fausse: suite à un éboulement le chemin indiqué a disparu au niveau du pont. On passe à côté de la centrale qui alimente la plupart des villages environnant (jusqu'à Khumjung) avant une montée raide qui nous ramène sur le vieux chemin. On traverse Thame pour monter jusqu'à Thame Gompa (monastère, 3950m) où un moine nous fait entrer et ou on signe le livre d'or. Un thé avec vue sur les fantastiques faces nord de l'autre côté de la vallée et sur le Kang Taiga nettement plus loin et on redescend à Thame (12h30) pour prendre ce qui se révélera être le plus mauvais dhal bat de notre séjour (dans le grand lodge de l'autre côté, nord, du torrent par rapport au village). On repart vers 14h (premier yak du séjour) et on emprunte le nouveau chemin qui passe le torrent au niveau d'un canõn impressionnant et reste beaucoup plus haut (vue) que l'ancien chemin. Après de multiples pauses (il fait beau), nous sommes de retour à Namche vers 16h30.

19/04/96 6h30, beau temps. Crêpes au déjeuner. Départ vers 7h40. Après avoir doublé un gros groupe dans la montée (raide) pour sortir de Namche, on découvre l'Everest à un détour du sentier. Bof, pas si joli que l'Ama Dablam bien plus blanc (et proche). La pyramide sommitale de l'Everest apparaît donc derrière la crête qui relie le Nupse au Lhotse, plus haut, plus loin que tous les autres sommets. Le sentier est pratiquement horizontal avant de plonger jusqu'au pont de Phunki (10h20, 3250m officiellement, 3320m d'après l'altimètre, ce qui paraît plus réaliste). Un thé et on attaque la montée (raide au début, régulière ensuite) au milieu d'un forêt de rhodos en fleur vers Tengpoche (3867m) qu'on atteint vers midi. Déception: une grande esplanade terreuse cernée par le monastère et quelques lodges miteux. On n'hésite pas trop avant de décider de continuer jusqu'à Pangboche. Avant de repartir, on n'oublie pas de sustenter avec des pizzas au fromage. Le chemin redescend légèrement pour traverser à nouveau le torrent et remonte jusqu'à Pangboche. On stoppe dans le dernier lodge du village (bas), Shiri Dewa lodge, 3950m. On profite de nos dernières ressources pour passer les 4000m et pas la même occasion battre notre record d'altitude (4010m au dôme des écrins). 4050m sera notre nouveau record du jour. De retour au lodge, on rencontre deux israéliens qui sont en acclimatation, l'un étant légèrement malade. Un autre couple d'israéliens arrive, de retour du Kala Pattar (leur mauvaise volonté manifeste lors de la commande du repas nous les rend antipathiques à souhait). La soupe aux lentilles et les "fried noodlles" sont excellents. Le début de la nuit l'est moins à cause d'un bordel monumental jusque tard dans la nuit.

20/04/96 6h30. Beau temps. Toasts, omelette. On décolle vers 7h40. Le chemin pratiquement horizontal est très facile jusqu'au pont (on croise un incinérateur) à 4145m (9h). Trois quart d'heure supplémentaires et nous sommes à Dingboche. Suivant les conseils des allemands de Namche, on s'arrête au Sonam Friendship Lodge, 4350m. À 10h40, nous sommes repartis, sans sac, pour le monastère dominant Dingboche. Au col en direction de Pheriche (4414m), on croise un gros groupe de français de retour du Kala Pattar et sur le chemin de l'Island Peak. Depuis ce col, on voit déjà le Makalu, triangle noir très loin à l'est. Évidemment, on ne s'arrête pas au monastère mais on continue jusqu'au sommet à 5075m (12h40). Record pulvérisé et premier 5000m. La fin a été lente mais s'est effectuée sans problèmes. Superbe vue sur l'Island Peak, le Lhotse, le Makalu, Le Cho Oyu et juste à coté l'Ama Dablam. On teste le réchaud butane-propane qui nous étonne en chauffant un litre d'eau en quelques minutes (3/4 l en 4mn). Soupe, purée, thé ... on récupère. La descente est rapide (1300m/h!) jusqu'au monastère (une maison ?) puis on prend notre temps pour finir jusqu'au lodge. On initie Andras au dés (10000) et on découvre le "groupe des australiens" (deux nouvelles-zelandaises, une suisse et ... un australien) qui ont le droit à beaucoup d'égards de la part de leurs guide (eau chaude avant le repas...). Je crois que c'est ce soir là que la passion d'Andras pour les yaks a commencé ... avec l'intention de laver les dents de celui qui dormait dans la cour. C'est ce soir la aussi que, sur notre exemple, tout le monde a pris une photo du coucher de soleil sur l'Ama Dablam puis quelques clichés des "tower cumulus". Un phénomène étrange ensuite: alors que la nuit était tombée et que le ciel était complètement dégagé, ce dernier était éclairé en permanence par la foudre de l'autre côté de l'Ama Dablam. Orage en air sec ?

21/04/96 6h30, 4C à l'intérieur, gel à l'extérieur, cirrus. Déjeuner en musique avec les 4 saisons. C'est notre deuxième jour d'acclimation. Sans sac, 1h30 nous suffisent pour monter à Chukkung, 4730m. Un thé et en 50mn nous sommes sur la taupinière dominant le village, 5045m. La muraille du Lhotse nous domine de ses 8500m. Derrière l'Island peak, au loin, le Makalu, l'Ama Dablam qui nous présente son flanc est, le Pumori, loin au nord-est (au dessus d'un col qui parait tout à fait franchissable... d'après la carte). 25mn et nous sommes en bas de nouveau au lodge de Chukkung. Les anglais, Bibi et les américains (Boulder, Colorado) sont là, plus bavards que jamais. Un couple de français également; des routards dont les semelles connaissent déjà tout l'Himalaya. Sous la pluie (fine), une heure nous suffit pour rejoindre Dingboche. Des tchèques (14) sont arrivés et occupent le dortoir: on a peur (à tord) pour le confort de notre sommeil (je passe les détails sur "Joubosh Horsefucker" et "Montain Goat", s'adresser à horyani@met.hu).

22/04/96 6h30, 10C à l'intérieur (c'est que ça chauffe, une bande de tchèques !). Aujourd'hui, c'est le canon de Pachenbell qui accompagne nos toasts aux oeufs (2 chacun!). Départ à 7h40, passage du col, chemin facile au dessus de la vallée de Pheriche, thé à Dungla. On arrive à Lobuje, 4930m vers 11h10, sous la pluie commencante. On choisit le lodge "en haut à gauche" vide pour l'instant. Nous sommes cloîtré (8C) tout l'après-midi à cause d'une météo très moyenne: il neige. Le petit sommet au dessus du village ne nous verra pas. Vers 17h, on sort tout de même (sous la neige) pour monter jusque sur la moraine voisine (5010m). Entre temps les "australiens" sont arrivés (les anglais et Bibi ont choisi un autre lodge, au grand désespoir d'Andras qui est presque aussi inspiré par Bibi que par les yaks...). L'australien (le seul du groupe!) est plutôt mal. Il a le droit à une bouffée d'oxygène et du Diamox qui n'améliorent pas vraiment les choses. Il décide de descendre mais il est de retour peu après estimant trop difficile l'étape jusqu'au prochain village. Pendant la nuit, son guide lui administrera encore de l'oxygène. Pour ce qui nous concerne, on se sent bien mais on dort peu (sauf Andras...).

23/04/96 5h15, 2C, beau temps. C'est le jour du sommet: il faut y être avant que les premiers cumulus ne pointent leur nez. On mange nos goûter Gerblé et à 6h on attaque. Le chemin monte doucement dans la première moitié, puis, après avoir rejoint la moraine, est plus oscillant. À 7h30, Gorak Shep, 5160m. Pour ma part, cette portion a été faite plutôt dans le flou (manque de sommeil ?). Vers 8h, on attaque le "tas" que constitue le Kala Pattar, 5545m. Raide au début, le sentier file à droite. Les quelques névés à traverser sont encore durs. Mais, que se passe-t-il, l'altimètre est beaucoup trop haut (contrairement à d'habitude) ? En fait, le vrai sommet du Kala Pattar est à 5623m (le 5545m est un sommet secondaire). 1h15 pour faire ces 460m derniers mètres (une pause de 10mn comprise), c'est pas si lent que ça. On est bien content d'être en haut: champagne, bananes séchées, photos... De ce vrai sommet, contrairement au faux, on peut voir le col sud de l'Everest. Camps de base de l'Everest et du Pumori sont à nos pieds. On découvre aussi le camp 1 du Pumori. On reste plus d'une heure à contempler le spectacle pas vraiment changeant (impossible de voir quiconque fouler un sommet). On repart vers 10h20 et à 12h30 nous sommes de retour à Lobuje. 2h de plus et nous sommes à Pheriche (4200m), une bonne journée. Conformément aux conseils des israéliens (que l'on a rencontrés à nouveau à Gorak Shep),on choisit le Himalaya lodge. Au repas du soir, un groupe de français (5) qui dort sous la tente se faire servir un festin préparé à l'extérieur du lodge; c'est presque luxueux.

24/05/96 6h30, 4C intérieur, nuageux. On repart vers 7h40, direction Phortse. Chemin facile jusqu'à Pangboche où (thé) on rencontre une française membre du groupe du CAF Paris. Elle a été malade à cause de l'altitude à Gokyo (intraveineuse) et elle est redescendue. Elle nous parle d'un mauvaise ambiance dans le groupe et envie notre indépendance... On repart vers 10h10 sur un chemin montant-descendant-montant... pour arriver vers midi à Phortse... sous la neige. On stoppe dans un lodge désert où on nous sert une soupe et des pommes de terre. Il fait mauvais mais il est tôt: on décide de continuer (13h) jusqu'à Konar. 3/4 d'heure plus tard, on y est. Il fait un peu meilleur: on continue. Il nous faudra encore deux heures pour arriver à Thare, 4380m. Sylvie frôle l'épuisement et la neige a repris. Le lodge de Thare est qualifié par Andras de "less commercial place", un pléonasme: un maison minuscule adossée à un rocher avec une cuisine séparée par une cloison en carton de la "pièce" comprenant deux tables et des bat-flancs. Peu après notre arrivée, 5 occupants repartent pour Phortse et on sera les seuls clients de la soirée. Il fait un peu froid (3C) et on s'enfile dans les duvets. Il neige toujours.

25/04/96 6h30, 3C à l'intérieur, nuageux à l'extérieur. On décolle vers 8h15. "Décoller" est un bien grand mot pour qualifier notre allure: nous sommes tous fatigués (pourquoi ?) et plutôt lents. Le sentier descend un peu puis remonte doucement jusqu'à Na (9h45). Il fait de plus en plus mauvais. Après un thé, on repart (10h15) sous la tempête de neige. La fatigue n'est pas passée et il nous faut plus de 2h pour (enfin!) arriver à Gokyo, 4750m, au bord du la gelé. On choisit la guest house "avec serre" ... pas très réchauffant par ce temps. Une énorme galette de pommes de terre est un excellent prélude à la sieste (il fait froid, 5C). Du "tibetan bread" pour le goûter nous occupe. Comme le poêle (alimenté en bouses de yak) est plutôt inefficace, on est couché de bonne heure.

26/04/96 6h20, -3C à l'intérieur, beau temps. On décolle à 7h30 pour arriver à 9h au Gokyo peak, 5380m (Sylvie et moi trouvons l'ascension plus dure qu'au Kala Pattar). On est monté trop vite ? L'avocet donne 470m/h pour les 300 premiers mètres, 365m/h pour le total (600m) ... avec 10% d'erreur sur l'altitude (trop bas). On boit le reste du Champagne. Tour d'horizon: Everest (8846m), Nupse (7879m), Lhotse (8501m), Makalu (8475m), Jobo Lapshan (6440m), Taboche (6367m), Kang Taiga (6685m), Thamserku (6608m), Kyajo Ri (6186m), Tongi Ragi Tau (6940m), Cho Oyu (8153m), Gyachung Kang (7922m), Pumori (7145m). On traîne au soleil dans la descente avant de savourer une plattée de momos. On repart ensuite pour une petite ballade (2h AR) jusqu'au 4ème lac, fantastique point de vue sur le cirque glaciaire à l'est du Cho Oyu. L'aller est plutôt fastidieux car les névés sont profonds et nous trop lourds! Le retour sur la moraine, avec une vue sur le bas du glacier tourmenté, charriant plus de pierre que de glace, parsemé de lacs, le retour, donc, est plus rapide. En bas, la serre est chaude ... jusqu'au moment ou le soleil se couche (tôt) derrière Gokyo peak. La soirée, encore fraîche à l'intérieur, est encore une fois assez courte.

27/04/96 6h30, -1C à l'intérieur, beau temps. Une petite pensée pour les anglais qui prennent l'hélicoptère a Syamboche. Que devient Bibi ? Des crêpes à la confiture dans le ventre, nous sommes prêts pour la descente à 8h. Un thé à Pangka vers 10h (lodge charmant), 12h40 à Dhole. Après la collation, on trouve un coin pour profiter encore du soleil qui risque de manquer dans le fond de la vallée. 16h à Phortse Tranga (3600m minimum malgré la carte...). Dans la descente, on a croisé le fameux "musk deer", un petit cervidé (50cm au garrot) qui a des allures de kangourou. À Phortse Tranga, le camping est plutôt plein (on a décidé d'utiliser la tente et le réchaud) et on se trouve un petit coin sympa sur une plate-forme, dans la forêt. Soupe, purée, musk deer encore. Non, on ne le mange pas, c'est lui qui goinfre des fleurs de rhododendrons, perché dans l'arbre (et les biologistes nous disent que c'est proche de l'antilope ?).

28/04/96 6h15, toile de tente gelée mais 7C à l'intérieur. On étale les duvets à l'extérieur et ... ils gèlent! Encore une fois, un musk deer nous nargue alors que nous démontons la tente. Comme on a rien à manger, on va déjeuner à la lodge: pain tibétain avec deux oeufs préparé par une femme avec sa gamine sur le dos! On redémarre 8h pour faire une pause au col à 3973m (505m/h, ça essouffle quand même un peu...) Un groupe d'allemand nous salue ... en allemand. Andras répond en hongrois... On repart sur le sentier plutôt horizontal au début, franchissant une barre rocheuse via des escaliers ensuite, en direction de Khumjung. Peu avant le village, on s'arrête pour faire sécher la tente. On continue ensuite jusqu'à Khunde aussi appelé village Hillary (un hôpital). On bascule sur Syamgoche où on s'arrête pour un "fried rice". Des grands chevaux mangent bruyamment à côté de nous. On reprend le chemin que l'on connaît déjà pour descendre sur Namche. Cette fois ci, le musée du parc est ouvert. Il y aurait sûrement plus à montrer et à dire sur la région de l'Everest que les quelques panneaux de ce musée mais on apprend quand même des choses. Vers 14h, on retrouve notre Thamserku view lodge préféré. On flâne un peu dans le village et va même jusqu'à faire un brin de toilette dans l'eau glacée. Encore quelques momos, de l'apple pie et on rejoint les bras de Morphée en compagnie deux chercheurs italiens en mission dans la région.

29/04/96 6h30, 13C. Une crêpe et on monte faire un saut à la maison du parc afin de contempler une dernière fois les sommet du monde. La météo n'est pas parfaite mais l'Everest (Reuter, 2 mai: 615 personnes au sommet depuis 1953, 133 morts sur la montagne) et le Lhotse sont au rendez-vous. Dernières photos et on repasse au lodge pour prendre nos sacs (8h40). On prend notre temps pour rejoindre les régions riches en oxygène. L'interminable ballet des porteurs de bois n'est pas terminé et on croise une foultitude de poutres et de planches. On s'arrête à Jorsale pour un thé, imités par les israéliens qui eux aussi descendent (et qu'on rencontrera régulièrement jusque dans les rues de Kathmandou). L'hôtelière du lodge de Phakding nous reconnaît et nous reprenons un dhal bat, comme à l'aller. Hésitation: Phakding était notre destination prévue pour ce jour mais il est facile d'aller jusqu'à Lukla. On pourra alors essayer de prendre un vol un jour plus tôt. Je ne suis pas très chaud (un jour de plus à Kathmandou ne m'inspire pas plus que ça) mais je me laisse convaincre. Il nous faudra deux heures (pas lentement du tout contrairement à ce que nous annonçait l'hôtelière) pour rejoindre Lukla. Là, pas de problèmes pour avancer notre vol d'un jour. On va dormir au Himalaya lodge, l'immense bâtisse qui domine la piste. Ce soir là, deux hélicoptères atterrissent, l'un repart (on aurait pu le prendre), l'autre reste.

30/04/96 6h30. Temps très moyen. L'hélico qui a passé la nuit là décolle. Ça sera le seul mouvement de la journée ... mais on ne le sait pas! On attend donc toute la matinée aux alentours de la piste. On enregistre même nos bagages. Pour patienter, on va prendre un thé au café Danphe où on découvre le nom d'un copain à Sylvie dans le livre d'or: il est passé par ici l'année précédente. Le temps se gâte en milieu de journée: brouillard, pluie. On bouquine... Vers 15h, on va récupérer nos bagages et on nous donne rendez-vous pour le lendemain. Il y a plus de monde dans le lodge que la veille et malgré une commande à 17h, le repas n'arrive qu'entre 19h30 et 20h! Un record d'attente incompréhensible dans un établissement si important ... et donc finalement non recommandable.

01/05/96 6h30. Le temps est nuageux, par conséquent tout désespoir est permis. Mais pendant le déjeuner le ciel s'éclaircit. On se presse pour aller enregistrer. Le premier hélico, de notre compagnie, arriver vers 8 et repart ... vers Syamboche avant de redescendre sur Kathmandou; il faut attendre la prochaine rotation. On décolle vers 11h15 pour un vol légèrement plus long qu'à l'aller: les nuages ne permettent pas de voler aussi haut. On est à l'hôtel vers 13h30 (taxi négocié à 150Rs cette fois ci). On passe confirmer nos billets de retour (le billet d'Andras se révèle être annulé... mais ça s'arrange) et c'est l'après-midi shopping. À part des vêtements, il n'y a pas grand chose à ramener... La librairie de Thamle, Pilgrim's books est par contre excellente. Dans une boutique, j'envoie un courrier électronique à l'ENAC (qui arrivera) pour 75Rs/kb (environ 7 lignes). Moderne. Comme le restaurant Thamel House conseillé dans le guide du routard est introuvable, on s'arrête, un peu au hasard, au Skala Vegeterian: un jardin agréable pour déguster d'excellentes salades ... et même plus. On rentre tard à l'hôtel: 22h!

02/05/96 On profite du confort pour déjeuner copieusement. En particulier, la Banana Pancake Tower vient compléter le premier choix (le déjeuner traditionnel): 3 crêpes épaisses empilées avec miel et banane... On prend le taxi pour Bhaktipur (300Rs sans négocier), à 16km à l'est de Kathmandou. L'entrée de cette ancienne capitale est payante (50Rs) mais c'est justifié: les voitures sont (plus ou moins) interdites dans la ville et ça rend cette dernière nettement plus agréable que Kathmandou: propre, calme et pas bondée du tout. C'est une ville "médiévale" ou la plupart de fenêtres sont constituées d'entrelacements serrés de bois. Les deux places principales sont cernées de pagodes. La visite de la ville se transforme rapidement en une recherche de rickshaws jouet en bois. Les prix varient du simple au double et les vendeurs n'ont pas l'air de vouloir s'en débarrasser. Finalement tout s'arrangera pour 650Rs pour deux unités (il y a deux neveux...). Il n'y a pas de problème pour trouver un taxi pour quitter la ville (150Rs) pour aller voir Pattan, à quelques kilomètres au sud de Kathmandou. La place principale de Pattan ressemble au Durbar Square de Kathmandou: des pagodes à la pelle. Des travaux aussi qui ne facilitent pas la visite. Le guide du routard nous emmène au Third World, un restaurant en terrasse qui domine la place. La nourriture est bonne est je me risque même au milk-shake (aucuns problèmes). Peu après, on se fait "coller" par un gamin "guide" qui n'a pas grand chose à nous apprendre ... et qui énerve sérieusement Sylvie. De nombreuses boutiques vendent des mandalas et on se fait un peu expliquer la symbolique de la chose. On décide alors de rentre sur Kathmandou à pied. Ce qui se révèle être une grosse erreur: il fait assez chaud et la marche le long d'une route à forte circulation est bien plus épuisante que l'altitude! M'enfin, on survit quand même jusqu'à Thamel où on part à la recherche du magasin de fromage (guide du routard). Ce magasin est introuvable et personne n'en n'a jamais entendu parler (une erreur du guide ?). On trouve un autre magasin mais finalement on achète rien. C'est l'heure d'aller goûter au steak de yak. On va tenter la Steak House (conseillé par le guide du routard). Ça se révèle pas terrible du tout: ambiance occidentale et surtout, pas de steak de yak sur la carte. On se régale quand même mais on préfère aller prendre un dessert à la Tibet's kitchen. Encore un tour chez Pilgrim et on rentre à l'hôtel pour notre dernière nuit.

03/05/96 Déjeuner pantagruélique (encore des tours de crêpes). Taxi à 10h30, formalités assez vite expédiées à l'aéroport et au-revoirs à Andras. On décolle à 13h15 comme prévu. À 14h30, on est à Dacca où il fait toujours aussi chaud. Comme à l'aller on donne nos passeports et nos billets et ... on nous emmène en bus dans un hôtel en ville pour passer l'après-midi. On a le droit à une espèce de chambre-cave (pas de fenêtre) assez puante. Heureusement qu'on a des bons bouquins. On a aussi le droit à une petite collation ... pas terrible. Vers 22h, on nous ramène à l'aéroport où c'est encore la jungle pour récupérer les passeports et les cartes d'embarquement. Enfin, on décolle vers 1h du matin. Le voyage est long (escale à Dubai) et la nourriture bien moins bonne qu'à l'aller: pas fâchés d'être arrivé à Orly.

04/05/96 Une journée à Paris et retour sur Toulouse. La collation d'Air Liberté (Champagne et saumon fumé) termine plutôt bien le voyage.


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